Albert
Aublet. Le sommeil (vers 1890)
Elle
avait finalement haussé les épaules.
– Que
ça te fasse de l’effet de me voir le derrière tout rouge, c’est
quelque chose que je peux comprendre. Et il y a, de toute façon,
vraiment pas de quoi en faire une maladie.
Elle
n’en avait pas fait une maladie. Et on n’avait strictement rien
changé à nos habitudes. On avait continué à vivre, vingt-quatre
heures sur vingt-quatre, dans le plus simple appareil.
Pendant
près de quinze jours, elle avait arboré un postérieur écarlate.
Rutilant. Qui reprenait des couleurs quasi quotidiennement. Et dont
la vision continuait à me bouleverser. Avec toujours la même
intensité. Même si je parvenais désormais à en contrôler plus ou
moins les manifestations extérieures. Plus ou moins. Parce que
j’étais, de temps à autre, inopinément sujet à de vigoureuses
érections auxquelles elle ne semblait pas prêter particulièrement
attention. Tout au plus lui extorquaient-elles parfois un léger
sourire.
Elle
était sur son petit nuage.
– C’est
par là que je le tiens ! Par la fessée. C’est vraiment par
là…
Et
ne mettait quasiment plus les pieds à la fac.
– Ben
oui, il y a que la journée que je peux le voir. Le reste du temps,
il est avec sa bonne femme.
En
mars, ça s’est un peu tassé. Elle en recevait encore, oui, mais
plus rarement.
– Il
y a moins de gôut, tu crois ?
– Comment
veux-tu que je sache ? Je le connais pas, moi, ce type. Je l’ai
seulement jamais vu.
– Oui,
c’est vrai, je suis idiote. Peut-être qu’il s’en lasse à
force de m’en donner. Ou bien alors il s’en est trouvé une autre
avec qui ça lui plaît mieux.
Elle
haussait les épaules.
– De
toute façon, il la quittera jamais sa Monique. Alors ou bien j’en
prends mon parti ou bien je me désenglue de là-dedans.
En
avril elle n’en a pas reçu. Pas du tout.
– C’est
que tu le vois plus, hein, c’est ça ?
– T’as
tout compris
– Il
t’a larguée ?
– Pas
vraiment, non. Soi-disant qu’il veut prendre un peu de recul. Mais
ça, c’est le sas de décompression avant la rupture. Pas la peine
que je me fasse d’illusions.
Mais,
contre toute attente, début mai ses fesses sont redevenues d’un
rouge flamboyant.
– Elles
me manquaient, ces fessées. Plus que lui, même, dans un sens.
Qu’est-ce qu’elles pouvaient me manquer !
– Et
à moi, donc !
On
s’est regardés. Et on a éclaté de rire.
Elle
a jeté ses clefs sur la table, son sac sur le canapé.
– Oui,
ben, en fait, comme prévu, c’était le mieux avant la fin.
– Comment
ça ?
– Il
part s’installer au Chili. Définitivement. Avec sa femme. Et tu
peux pas savoir quel soulagement c’est pour moi, finalement, dans
un sens. Parce que danser sans arrêt d’un pied sur l’autre,
toujours se demander, jamais savoir, se sentir sans arrêt ballottée,
c’est d’un épuisant à force.
Elle
avait raté ses examens.
– En
plus ! Mais ça, c’était couru.
Des
sanglots hoquetés m’ont brusquement réveillé. On était en juin.
Un juin torride. Étouffant. Pour avoir un peu d’air, on laissait,
la nuit, ouvertes les fenêtres et les portes des chambres. Je me
suis levé. Approché. Elle était nue sur son lit. Elle me tournait
le dos. Je lui ai posé une main sur l’épaule.
– Ça
va pas ?
Ses
sanglots ont redoublé.
– Il
te manque ?
– C’est
pas ça, non. C’est pas lui.
– C’est
quoi alors ?
Elle
a murmuré.
– Donne-m’en
une ! Une fessée. Donne-m’en une…
Et
elle s’est tournée sur le ventre.
J’ai
levé la main. Je l’ai abattue.
Mais pourquoi ça ne me surprend pas, hein, on se le demande... J'adore !
RépondreSupprimerÇa couvait… Ça couvait… Fallait bien que ça finisse par arriver.
SupprimerFallait y penser avant, mon vieux! Ou bien t’attendais qu’elle te fasse un dessin? xDD
RépondreSupprimerIl voulait peut-être pas marcher dans les plates-bandes du copain de la colocataire. Il faut parfois savoir attendre son heure.
RépondreSupprimerL’autre zouave? Mais celui-lá était juste bon pour se faire fesser par sa légitime...
RépondreSupprimerEn tout cas il était clairement sous sa coupe. Merci de votre passage et de votre commentaire.
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