14 heures
– Le
jour où tu l’as rencontré Enzo, t’étais habillée comment ?
– Pourquoi
tu me demandes ça ?
– Parce
que… T’étais habillée comment ?
– Comment
tu veux que je me rappelle…
– Mais
bien sûr que si que tu te rappelles…
– Peut-être
ma robe rouge… Oui, c’est ça… Ça me revient… Ma petite robe
rouge…
– Pas
étonnant qu’il ait craqué Enzo… Passe-la !
– Hein ?
Mais pour quoi faire ?
– Tu
verras bien… Vas-y ! Mets-la !
– Mais
où tu m’emmènes ?
– Tu
commences pas à t’en douter un peu ?
– Ben…
Dans la mesure où on est à Toulon…
– Où
tu as d’excellents souvenirs, non ?
– Tu
vas pas…
– Te
remmener boire un coup là-bas ? Si ! Que tu poses ton
petit derrière si joliment puni par Nathalie sur la chaise même où
tu as fait la connaissance de son petit ami… La boucle sera
bouclée… Et on pourra passer définitivement à autre chose…
C’est pas une bonne idée ?
– Je
sais pas… Peut-être… J’en sais rien…
– C’était
cette chaise-là ?
– Oui…
L’autre, c’était Christine…
– T’as
de la chance… Elle est libre… Bon, ben je te laisse…
– Comment
ça, tu me laisses ? Tu vas où ?
– Un
peu plus loin là-bas… Je te laisse méditer sur tout ça… En
toute tranquillité… Ça devrait te faire le plus grand bien…
Dès
que je l’ai vu s’approcher le type, l’air faussement distrait,
j’ai su qu’il allait le faire… Qu’il allait s’installer à
la table d’à côté… Ce qui n’a pas loupé…
– Il
y a quelqu’un là ?
– Vous
voyez bien que non…
– Vous
pourriez attendre des amis… Et avoir besoin de la table… Des
chaises…
– Ce
n’est pas le cas…
– Oui,
hein ! Moi, c’est pareil… Pour se faire des amis
aujourd’hui…
– En
ce qui me concerne en tout cas j’en ai…
– Ben,
on dirait pas… Vous êtes là, toute seule, avec la tête de
quelqu’un qui vient d’enterrer toute sa famille…
– Vous
inquiétez pas pour moi… Prenez pas cette peine… Tout va très
bien…
– Ben,
vous en avez de la chance ! Parce que moi… Oh, mais je vais
pas vous prendre le chou avec mes problèmes… Vous vous en fichez
n’importe comment…
– Elles
ont toujours une fin les mauvaises passes…
– Vous
vous rendez pas compte dans quelle situation je suis… Non… Vous
pouvez pas… Parce que voilà cinq minutes que je discute avec une
super nana… Une beauté à se mettre à genoux devant… Que je me
dis que c’est peut-être la femme de ma vie… Et que si je ne
trouve pas les mots pour la retenir, pour lui donner envie de me
revoir, elle va disparaître à tout jamais…
– Pauvre
malheureux que vous êtes…
– Si
vous saviez ! C’est désespérant…
Je
me suis levée…
– Vous
vous en remettrez…
– On
se reverra ? Laissez-moi au moins un espoir…
– Je
crois pas, non…
Et
je me suis éloignée… J’ai regagné la voiture…
– Ah,
ben bravo !
– Mais
enfin, Gilles ! Qu’est-ce que je peux y faire, moi, si un type
il vient s’asseoir à la table d’à côté…
– T’étais
pas obligée de discuter avec…
– Vu
comment elle s’était engagée la conversation, c’était
impossible de pas lui répondre…
– Ben,
voyons !
– Si,
c’est vrai, hein !
– Ça
te déplaisait pas… Ça se voyait comme le nez au milieu de la
figure… Et je suis bien tranquille que si tu m’avais pas su là,
derrière, ça aurait duré beaucoup plus longtemps… T’y aurais
passé l’après-midi… Et après…
– Tu
te fais un film, Gilles, je t’assure…
– Regarde-moi !
Il te plaisait pas ce type ?
– Peut-être
un peu…
– Un
peu plus qu’un peu, non ?
– Il
avait du charme… Et puis des yeux… C’est fou des yeux comme ça…
– Des
yeux pleins de désir pour toi… Et ça, c’est quelque chose à
quoi tu n’as jamais pu résister…
Je
me suis blottie contre lui… Il m’a doucement caressé la joue…
– Qu’est-ce
qu’il va y en avoir des fessées en attente…
– Tant
que tu voudras, Gilles… Tout ce que tu voudras…
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